Etape 5 : la présence de l'Ombre

 

Lorsqu'il se risque  à faire l'expérience du désert l'ermite est très vite confronté à l'obscurité qui vient à sa rencontre...

Chacun porte en lui ses zones d'ombres, d'insatisfactions, de rejets...
des état de nous même que nous ignorons et n'acceptons pas ou n'acceptons plus en face des divers "personnages de lumière" que l'on se construit ou s'est construit pour paraître à notre avantage devant les autres...ou devant nous même...

Nous refoulons ainsi des réalités,des expériences, des souvenirs de nous même et nous forgeons une image qui rassemble uniquement nos qualités...
C'est ainsi que peu à peu nous nous persuadons que nous sommes tels que nous aimerions être...et que nous fabriquons l'histoire...où tout était beau, facile, aisé...mirage !

...et avant que l'échafaudage ne s'écroule un jour inévitablement !!!...

Cependant en permanence nous portons nos ombres qui influencent inévitablement nos actes et les déterminent inconsciemment et souvent contre notre gré...

C'est ainsi que pleins de bonnes intentions, nous voulons aimer tout le monde par...et en fait  que nos relations avec les autres montrent tout le contraire...
 faisant preuve d'impatience, de mépris ,voire d'agressivité...réactions qui nous étonnent nous même parfois...ou dont nous ne nous rendons pas compte... tant nous sommes attachés à ne regarder que la "belle image" de nous même...alors que les autres eux "voient" autre chose...
que la belle image de narcisse patiemment forgé par notre ombre...

Ces obscurité refoulées font partie de nous même...et nous les enfouissons par le bias des "distractions", des "divertissements "pour qu'elles ne viennent pas trop nous troubler  :...
tv...drogue ...alcool , vitesse, compétitions sportives, frénésies d'achats etc...etc...

ou même la "sainte activité" si chère aux" cathos bigots"

C'est ainsi que nichent en nous même inconsciemment  insatisfactions, insécurité, anxiété, désespoir, colère, irritation, solitude, dépression , tristesse, déception, sentiment d'infériorité , de culpabilité, indifférence, jalousie apitoiement sur soi... toutes masquées par le grand  et si important narcisse !
Sentiments qui ne viennent pas de l'extérieur, mais de l'intérieur de nous même...
les événements extérieurs n'étant que les facteurs déclenchants de leurs manifestations...

Ainsi que pour vivre moins péniblement l'homme dissimule son état tourmenté derrière un voile.
voile qui représente la résistance face aux souffrances engendrées par ses obscurités, mécanisme de défense de sa sensibilité, masque nécessaire à la fragilité et la susceptibilité de son tegard...et de celui des autres...

Ce voile est posé telle une plaque de béton sur notre "cerveau obscur" et sur tous nos sentiments...

Impossible d'accéder à ceux-ci et à ce que nous sommes "vraiment" sans soulever cette dalle...
 nous sommes séparés de notre moi véritable de notre identité profonde, de notre être...

Toute vie spirituelle est divisée en deux périodes.
 La première est qualifiée de précontemplative.
Le progrès spirituel dans cette période est obtenu à force d'efforts personnels. Nous devons réfléchir, peser le pour et le contre, explorer notre conscience. 
Nous pensons, nous décidons et prenons des résolutions. Ces résolutions sont renouvelées et traduites en actes jusqu'à ce qu'on obtienne la transformation désirée. L'amour et la foi dans le sens des choses grandissent en nous.

Après un certain temps, nous passons à la phase contemplative.
  Notre comportement change. Nous devons maintenant apprendre à contempler uniquement l'Ultime et à renoncer à tout le reste, au lieu de nous préoccuper de notre propre évolution spirituelle.
 Nous prenons conscience que si nous essayons simplement de nous tourner vers l'Ultimité des choses tout le reste nous sera donné en grâce.( naturellement par la force qui nous sou tend et sourd en nous).


 La différence est très importante. 
Dans la phase contemplative tous nos efforts concernent l'union avec le Tout Autre. 
Tout le reste coule de source, est donné en grâce. 
Nous ne nous préoccupons plus du tout du monde terrestre.
 Cela ne veut pas dire que nous restons inertes, mais tout simplement que nous ne nous faisons pas de soucis. Nous ne dépendons plus des résultats.
 La pression qui nous pousse à "produire des résultats" diminue. 
Dans la phase précontemplative, par contre, nous nous efforcions de changer non seulement nous-mêmes, mais aussi le monde. 
Nous devions absolument obtenir un résultat. Tout cela n'apportait que tensions, soucis et stress.

Ces deux formes de vie spirituelle sont forcément liées aux réalités intérieures de l'être humain, à sa couche obscure et à sa réalité essentielle ( ce qu'il est vraiment de par son génome). 
La zone non recouverte par la couche obscure est celle de la précontemplation, alors que la zone recouverte représente celle de la contemplation.
 Concrètement, cela signifie que dans la zone non recouverte par le voile, les règles qui prévalent sont celles des idées destinées à changer le monde : nous devons penser et atteindre des objectifs. 
C'est le monde rêvé de l'idéal, du concept, de la finalité, de l'origine...
Bref le monde de Platon à la sortie de sa caverne. Un monde qui n'a de réalité que dans notre cerveau...


Contempler est donc une activité purement spirituelle par laquelle nous ne souhaitons rien obtenir. Elle implique toujours un abandon et une focalisation sur quelque chose. 
On peut faire confiance. On peut aimer aussi. 
Ce n'est toutefois pas l'amour comme nous le comprenons habituellement 
Non 
il s'agit de l'amour pur, qui n'attend plus rien de l'autre. 
Cet amour, c'est comme le soleil qui brille sans discontinuer, même quand ses rayons ne pénètrent pas ou sont réfléchis. Il vient de la contemplation,  il est spontané.
 En demeurant dans la contemplation, notre amour grandit tout naturellement et s'étend à l'ensemble des êtres et des choses
. Enfin, on peut aussi souffrir. Le mal souffert dans la contemplation et dans l'amour est accepté... et ne réapparaît plus jamais

La méditation nous calme peu à peu.
 Elle nous conduit au «voile» dont nous avons parlé, à notre résistance face aux crispations , aux noeuds de notre être. 
Si nous restons dans la perception en étant attentifs, le voile se soulève et nous arrivons alors dans la zone que nous avons appelée «couche obscure».
 Nous faisons l'expérience de nos sentiments négatifs, qui nous séparent de notre vrai moi, de notre être et des autres.

 
Spontanément, nous nous mettons à penser et à agir. 
Nous nous demandons d'où proviennent ces obscurités, pourquoi elles existent et comment les supprimer. 
Nous devenons ainsi actifs et nous retrouvons nos vieilles habitudes... de la pensée et de l'action. 

Mais comme dans la zone contemplative penser ou agir est impossible, nous nous retrouvons une fois de plus au delà du voile, dans la zone précontemplative.


Pour demeurer dans la zone contemplative, il faut rester dans la « contemplation ». 

Dans notre méthode, « contempler » signifie se tourner vers la perception des mains et, par la même occasion, de la réalité présente.
 Il s'agit de garder notre regard tourné vers notre vrai fond, vers la présence de l'être.
 Nous pénétrons plus en profondeur, dans la couche d'obscurités, source de souffrances.

 
Pour demeurer dans la contemplation, nous devons accepter et supporter ces souffrances.
 Toutes les souffrances vécues dans la contemplation de l'Être se dissiperont et ne reviendront plus.
 Notre être véritable nous éclaire et nous renforce tellement que nous aurons alors le courage de persévérer... sans que cela nous fasse effort

Ainsi il est important de guérir de nos obscurités et d' aider les autres à faire de même. 
Or, seul l'amour désintéressé et la compassion dissipent les obscurités.


 Lorsqu'une personne est aimée vraiment, elle accepte et endure de mieux en mieux ses obscurités et peut ainsi s'en libérer. 
Nous empruntons cette voie non seulement pour nous-mêmes, mais aussi pour les autres. 


Pour aider les autres à se libérer, il faut dégager ainsi beaucoup d'amour. Celui qui pense pouvoir contribuer efficacement à la délivrance de ces concitoyens sans se prêter de bon coeur à ce processus  se trompe. 
Nous ne pouvons dégager que ce que nous sommes. Le rayonnement touche l'être humain à l'intérieur, dans la zone de contemplation, là où a lieu la véritable délivrance. L'efficacité de tout travail avec des personnes, qu'îl s'agisse d'accompagnement spirituel, d'oeuvre caritative ou de travail social, dépend plus du niveau de purification personnelle que de la diversité ou de la compétence en ces activités.

Au moment de commencer des "exercices de contemplation" , nous sommes envahis par les soucis et les pensées de la vie quotidienne,
 Après deux jours de silence intensif, cette agitation commence à disparaître. 
Nous sommes alors généralement plus recueillis que dans la vie de tous les jours.
Nous nous rapprochons de notre « moi » profond et, par la même occasion, de nos obscurités.

 
Mais...d'une part, nous voulons accéder à notre « moi » profond, mais d'autre part, nous ne voulons pas plonger trop profondément en nous pour que nos obscurités n'émergent pas.
Nous avons tendance alors à rester dans la meditation ,mais évitons inconsciemment de rentrer trop en nous-mêmes, par de petites digressions.... et des pensées commencent tout à coup à nous assaillir. 

Souvent nous ne comprenons pas pourquoi nous sommes à nouveau confrontés à un flot de pensées.
 Il s'agit parfois de sujets opiniâtres dissimulant certains soucis. 
La plupart du temps, il s'agit d'un flot ininterrompu de pensées sans importance. 


Le silence, la vigilance ainsi que l'absence de distractions, de mécanismes de fuite et de refoulements ont remué quelque chose dans l'inconscient et ce quelque chose veut remonter à la surface pour être délivré. 
Nous sommes effrayés par tout ce flot de pensées et nous nous demandons ce que nous avons fait
de mal. 
Nous nous surprenons de nouveau a penser et quittons la voie empruntée. 
Nous passons  de la zone contemplative à celle située au-delà du voile.


 Si nous ne nous laissons pas abattre par cette erreur, mais si nous continuons à prendre, sans crainte aucune, conscience du présent, autrement dit de nos mains, le processus de libération commence.


Au cours de ce processus, les pensées peuvent se multiplier ou donner lieu à des réactions corporelles. 
La pression de l'inconscient s'exprime alors par exemple par des douleurs aux genoux ou au dos. Les omoplates peuvent elles aussi faire mal, à moins que des sensations désagréables ne se manifestent dans d'autres parties du corps.

Si nous ne nous interrogeons pas sur l'origine et la cause de ces somatisations, mais restons dans la perception, la pression peut alors encore s'intensifier. 
Elle apparaît souvent sous la forme de tensions corporelles. 
Il ne s'agit plus de douleurs physiques comme les douleurs aux genoux mentionnées précédemment, mais bien d'un autre type de souffrance : le souffle devient court et ne descend plus dans la cage thoracique. 
On se sent oppressé, comme si une pierre énorme était posée sur notre poitrine. 
Le ventre est tendu et la gorge serrée. 
A tout cela peuvent s'ajouter un sentiment de malaise, des bouffées de chaleur ou des problèmes de déglutition. 
On sanglote, on tousse, on se gratte, on bâille, on pleure ou on s'endort. 
Ces phénomènes cessent souvent à la fin de la méditation, mais dès que nous recommençons, ils réapparaissent.

Que s'est-il passé? 
La pression exercée par notre inconscient a gagné les mouvements propres à notre corps. 
Comme dans le corps elle se heurte à des blocages, des douleurs diverses apparaissent. 
Il vaut mieux ne pas chercher à en connaître la cause et de ne pas rejeter les sensations désagréables. 
Tout ce qui est a le droit d'exister. 
Les obscurités se manifestent pour être libérées

Le processus peut encore continuer et un sentiment puissant apparaît généralement. 
Nous ressentons par exemple une certaine colère vis-à-vis d'une personne avec laquelle nos relations sont généralement tendue : nos parents ou de quelqu'un d'autre. 
Une grand tristesse peut aussi nous envahir. 
En d'autres occasions il peut s'agir d'une impatience, d'un sentiment d'inutilité, voire de solitude.

  La pression exercée par l'inconscient s'exprime ainsi sous la forme d'un sentiment négatif. 
Puis, après une vague d'obscurités vient souvent une période plus calme et plus recueillie.
Les souffrances endurées dans la contemplation sont délivrées.
 Elles ne reviennent plus jamais. 
Il est probable que d'autres vagues de sentiments identiques ou similaires surviennent, car de tels sentiments incons cients ne disparaissent généralement pas en une seule séance. 

Avec le temps, tout ce qui est enfoui en nous est déblayé couche par couche, comme une montagne ...ou comme les "pelures" d'un oignon
Voilà comment a lieu la délivrance.


La plupart du temps, la pression engendrée par le mal être fait que les pensées se multiplient, des douleurs physiques apparais sent, des tensions et des crampes surgissent dans une ou plusieurs parties du corps. 
Cette évolution s'achèvent souvent dans un « sentiment », mais ce n'est pas toujours ainsi.
 Il se peut qu'une seule de ces réactions survienne puis disparaisse. Plusieurs de ces réactions peuvent aussi se manifester, dans un ordre différent. 
Le point commun entre ces différentes réactions, c'est que dans la méditation elles se manifestent avec plus d'acuité. Elles disparaissent souvent à l'issue du temps de prière.

 Il existe une règle fixe en ce qui concerne les douleurs physiques : si ces douleurs persistent encore un certain temps après la méditation, assurez-vous que vous n'avez aucun problème physique et consultez un médecin...


Il est important de pouvoir interpréter correctement ces situations et de ne pas se laisser entraîner à penser ou à agir. Tout ce qui est a le droit d'exister. 
Ne vous préoccupez pas des douleurs, tensions ou pensées éventuelles. 
Essayez de rester dans la perception de la réalité présente. 
Demeurez vigilants et soyez disposés à souffrir tout ce qui advient. 
Ne rien refouler et en même temps ne se soucier de rien, c' est comme marcher sur la crête d'une montagne.

 Lorsque des douleurs apparaissent, nous les traitons comme une blessure.
 Il faut commencer par la nettoyer, la panser et ensuite nous pouvons reprendre nos activités.
 La blessure continuera de faire mal pendant quelque temps, mais nous ne devons plus nous en occuper.
 Elle guérira d'elle-même, ou plus exactement par la force vitale que nous avons et qui sourd en nous

Pour les obscurités qui se traduisent par des douleurs, c'est la même chose.
 Les regarder, c'est comme panser la blessure.
 Si nous laissons être ce qui survient, nous ne devons plus nous en soucier. 
Nous pouvons alors reprendre le travail, ce qui, dans notre cas, revient à nous tourner vers les mains.
 Notre douleur disparaît. 
La force de l'esprit dissipera l'obscurité, à condition de rester fidèlement dans le présent.


Passons à la pratique pour ce 5ème temps :
sentir le coeur de nos paumes sera encore notre méthode

  Je vous rappelle que  lors de chaque méditation, il est bon de renouveler votre intention de servir et de louer l'Être de prendre brièvement conscience de votre corps puis de vous tourner exclusivement vers la perception de vos mains, comme vous l'avez fait jusqu'ici.

Lorsque vous êtes parfaitement présents, dites un long OUI dans vos mains, tout en expirant. 
Ce OUI doit « venir de l'intérieur ». 
Ne bougez pas les lèvres 
Dites-le avec un son venant de l'intérieur et écoutez attentivement sa résonance. 
Tendez également l'oreille vers la paume de vos mains, pour entendre comment ce « oui » y parvient.
 Le « oui » ne doit pas nécessairement parvenir jusqu'à vos mains. 
Vous devez tout simplement être attentifs pour savoir si, en prononçant le « oui » vous percevez un doux courant dans la paume de vos mains. 

Après quelques tentatives, dites ce « oui » à chaque expiration. 
Soyez toujours attentifs à sa résonance intérieure et à son effet dans vos mains.
 Ne cédez pas à une philosophie du « oui » et ne vous demandez pas si votre vie est un « oui » ou un « non ». Considérez simplement ce « oui » comme un mot qui résonne. 

( je rappelle que ces propos sont extraits du livre du Père Jalics " ouverture à la contemplation" et paru chez Desclee de Brouwer-Bellarmin en 2002)