Après cette île l'une des plus belle nuit en mer comme d'hab ( Merci à Titus et à José qui assurent les quarts alors que nous les loupiots nous dormons...) Ce matin nous sommes devant un grand plateau de lave qui s'élève au dessus de la mer comme un porte-avion ...
il s'agit d'Eiao une ile inhabitée où Georges de Caunes ( le père d'Antoine) dans les années 60 mena une expérience de survie qu'il du abandonner au bout de 6 mois à cause de la dureté de la solitude içi...
A la suite d'une rupture sentimentale Georges de Caunes
signe un contrat
d'exclusivité avec la RTF pour une expérience de vie solitaire d'un an avec
contact journalier sur les ondes ...
le choix d'une « vraie » île se porta sur Eiao, parce qu'elle était déserte,
éloignée de tout, et surtout parce qu'elle appartenait aux Domaines qui
donnèrent à Georges de Caunes l'autorisation de s'y installer pour un franc
symbolique.
Culminant à cinq cent soixante-seize mètres, Eiao se trouve à une centaine de kilomètres de Nuku-Hiva (centre administratif des Marquises). Médecin de l'assistance indigène dans ce territoire d'outre-mer, véritable « Dr Schweitzer de la Polynésie », le Dr Louis Rollin annonçait la couleur pour avoir approché cette île en 1925: « Les Marquises sont desîles montagneuses, coupées de vertes vallées profondes. Elles peuvent compter parmi les plus belles du monde mais il y a un mais, elles se terminent dans le Nord-Ouest par une petite soeur déshéritée, ô combien, Eiao, qui est un coin d'enfer aux portes du paradis.
Figurez-vous, au coeur du Pacifique, un de ces
îlots calcinés qu'on rencontre dans la mer Rouge au large des côtes d'Arabie.
Longue d'une dizaine de kilomètres, séparée en deux versants par une crête peu
élevée; alors que le versant est est relativement rafraîchi par les vents
alizés (Eiao gît exactement sur le huitième degré de latitude sud en plein
climat équatorial), son versant ouest, sous-venté, est torride. [...] Et c'est
sur ce versant que s'ouvre la seule anse de débarquement, pompeusement appelée
"baie de Vaitahu".
Cette anse de Vaitahu, très poissonneuse, donc hantée en permanence par les
requins, est uniquement bordée de rochers. Pas dix mètres de plage sablonneuse
où l'on puisse seulement prendre un bain de pieds. Sur sa droite aboutit un
ruisseau fangeux qui charrie des cadavres de rats, de lézards et les
excréments des animaux qui y viennent boire'. »
Réjouissant! Cette terre de
falaises et d'éboulis, en forme de quart de cercle, est peut-être la plus
ancienne de la Polynésie : elle fut vraisemblablement découverte à la fin du
XVIIIe siècle par un marin français, Étienne Marchand, qui y fit escale au
cours d'un périple à bord de son navire baptisé Le Solide. Solide aussi devait
être le solitaire de la RTF quand le bateau le déposa sur cette île àla végétation ravagée par la chaleur et les moutons: « Un point noir d'abord,
comme sur la carte, qui, peu à peu, augmentait de volume, tout en restant une
tache, une masse, un bloc noir. Et le silence, un silence lourd, hostile,
pesant alors que nous longions les parois verticales de la côte est, réputée
la plus accessible. [...] "C'est l'antichambre de l'enfer!" Voilà quelle fut
ma première réaction'. »
De même que le héros de Daniel Defoe avait cannibalisé l'épave du navire
échoué, Georges s'autorisa à emporter du matériel de pêche, une pharmacie
personnelle, des livres, une tonne de graviers, mille litres d'essence pour
alimenter les groupes nécessaires à ses retransmissions radio, quatre cents
litres de pétrole, des conserves de l'armée, un 22 long rifle et des
munitions. Sans oublier les émetteurs radio qui devaient le mettre en relation
avec Paris via Papeete.
Une fois le déchargement des caisses terminé, les
Marquisiens reprirent la mer, laissant non sans inquiétude et mise en garde,
dans une solitude absolue, sur ce gros rocher noir et nu défiguré par
l'érosion, ce journaliste venu d'ailleurs. Dès que le navire eut disparu à
l'horizon, le naufragé volontaire, seul avec son chien, ressentit le vide.
Mais il n'avait pas le temps de s'adonner à ses angoisses métaphysiques : ses
premières préoccupations furent toutes matérielles. « Désormais, tous les
soirs, un peu avant vingt heures, nous abandonnons la TV et prenons la radio
d'État. Cela se passe généralement dans la cuisine. Il flotte une bonne odeur
de soupe auxpoireaux et aux pommes de terre. La nuit est venue. Les volets sont fermés.
Des bûches brûlent dans la cheminée aux briques noircies. La maison a déjà sa
lumière d'hiver, ouatée, amicale. Alors la voix s'élève : "Allô Papeete ? Allô
Papeete ? Ici Eiao. Ici Eiao..." Depuis son îlot du Pacifique, c'est Georges
de Caunes qui nous parle », racontait François Brigneau'. Le spectacle
radiophonique pouvait enfin commencer dans les chaumières.
« Les gens de Polynésie et ceux de France qui m'écoutent se demandent ce que
je vais faire dans cette île : eh bien [...] je vais tâcher de l'améliorer. »
Un voeu pieux au regard des conditions climatiques et de l'écosystème: les
températures de quarante-cinq degrés, l'absence d'ombre et surtout l'action
combinée des hannetons et des moutons réduisaient à néant ses plantations de
coco, de tomates et de salades. Les quelques moutons, laissés à l'origine par
des marins de passage, devaient constituer un « réservoir de nourriture » pour
les escales à venir. Mais ils s'étaient multipliés, avaient tout brouté,
ravagé, ne laissant qu'un désert. Ils étaient environ deux mille, à charge
pour Georges d'en éliminer le plus possible, tâche qui ne lui était guère
agréable et pour laquelle on lui avait confié la carabine 22 long rifle.
La vie à Eiao est quasiment impossible pour l'homme, rendu trop vulnérable par
toutes les agressions naturelles. Dans le film en seize millimètres qu'il
réalisa pour la télévision, on découvre un Georges de Caunes méconnaissable, barbu, très amaigri, en
compagnie de son seul ami, le chien Eder.
Sur ces images sans concession et
émouvantes, on les voit tous les deux aux prises avec les nonos, ces petites
bêtes qui s'accrochent à la peau pour aspirer le sang. Dans La Croisière du «
Snark », Jack London décrit précisément ces insectes sanguinaires toujours en
embuscade: « Les indigènes les appellent "naunaus", qu'on prononce comme "now
-now", nom admirablement approprié car ces mouches constituent un présent
persistant. Lorsqu'elles festoient sur votre épiderme, le passé et l'avenir
n'existent plus. [...] Il ne faut, sous aucun prétexte, les écraser sur vous!
Elles sont si perverses qu'à la seconde où vous les annihilez, elles déversent
leur dernier atome de poison dans votre corps. » Un autre plan montre le
Robinson français essayant de dépecer un mouton qu'il vient d'abattre, et
qu'il ne peut manger à cause de ces mêmes nonos et de la chaleur insupportable
qui donne à l'animal mort une odeur pestilentielle. Les jeunes générations
reconnaîtront Tom Hanks, rescapé d'un crash d'avion sur une île déserte, dans
le film Seul au monde (2001) de Robert Zemeckis, qui revisite sans vergogne le
mythe de Robinson Crusoé.
Nous on a
pas vu de moutons mais seulement des biquettes...
il a pas pu confondre quand même ?...ou une trasmutation ?
Dans sa petite maison en tôle ondulée, Georges tenta de créer des courants
d'air et de se protéger des bêtes en installant des moustiquaires: une triste
réalité des Tropiques dont il lui était difficile de se détacher.
L'eau du
ravin, magnésienne, le rendait malade: il en buvait tout de même quatre litres
par jour. Quant aux poissons, ils portaient ils étaient impropres à la consommation. Alors il se
nourrissait de riz, de lentilles, parfois de thon en boîte. Dans ces
conditions, malgré son exceptionnelle résistance physique, il ne pouvait tenir
bien longtemps. D'autant que son chien (dont il avait exigé la présence à ses
côtés auprès des autorités polynésiennes) lui causait des soucis. Un jour
qu'il poursuivait un bélier, il sauta sans faire attention sur les rochers
pointus et disparut derrière. « Je m'assois sur une pierre, désespéré,
modulant à l'infini les deux syllabes "Eder... Eder!" [...] À trois cents
mètres de Goyetchea [nom donné à sa petite maison], cette tache blanche,
immobile sur le rocher, c'est mon chien. Il vit encore. Je le prends dans mes
bras. Je lui parle comme à un enfant'. » « Il avait tellement peur que le
chien fût en plus mauvais état que lui. C'est cela qui avait bouleversé la
France », dixit Michel Drucker.
Malgré tous ces tracas, le Robinson français s'était établi un emploi du temps qu'il respectait scrupuleusement: sa journée démarrait à six heures du matin avec le lever du soleil déjà brûlant. Il s'efforçait de tenir un cahier faisant état de ses activités de « colonisateur » de l'île et de ses réactions. Puis il transmettait ses chroniques tous les jours vers onze heures, et ce, sans aucun retour. Le technicien de Papeete lui répondait simplement: « Ça va, bien reçu. » À l'antenne, lorsque l'on réécoute ses chroniques, on retrouve le style de Caunes, avec cette ironie caractéristique et toujours ce refus obstiné de l'esprit sérieux bien que la voix devienne au fil des jours plus monocorde.
Remarquable conteur, il y donne des nouvelles de sa santé ainsi que
de celle d'Eder, du chat Patisson et de sa poule la Callas, qui ne cesse de
glousser! Antoine ne cache pas son admiration devant ce père différent: « Chez
ma mère, dans la chambre de ma grand-mère, sur un vieux poste de radio pourri,
j'entends la voix de mon père qui est perdu sur une île déserte, en train de
jouer les Robinsons, à l'autre bout du monde. J'ai neuf ans et c'est
extraordinaire. » Ses sueurs, Blandine et Lison, lui emboîtent le pas: « Nous
étions inquiètes mais fières de lui. »
il y a a aussi des cochons-bois
Le Noël 1962 et le premier de l'an 1963 furent pénibles pour lui. La boîte de
foie gras qu'il avait ouverte ressemblait davantage à un pot de confiture tant
la graisse s'était liquéfiée. Impossible de manger (qui plus est seul) ce mets
typique du Sud-Ouest. « La solitude m'était particulièrement sensible à
l'heure des repas. Pour l'être civilisé, manger est un plaisir de société.
[...] Il y a un sonnet de Sully Prudhomme, un de ceux que l'on apprend sur les
bancs de la communale, qui me revenait souvent en mémoire dans mon île
"journalistique" (je veux dire cadre de mon activité professionnelle) : "Le
boulanger m'a dit en rêve: fais ton pain." L'île, quand elle est déserte, vous
redonne le goût du pain... et des autres'. » De même, lorsque l'ombre tant
recherchée lui accordait un peu de répit, il se nourrissait ausside livres... de vie en société: il lut ainsi tout Balzac, dans la collection
de la Pléiade, du premier au dixième volume, un luxe qu'on ne peut s'offrir
que sur une île déserte ! «Je devenais une sorte de Rastignac au petit pied et
me voyais entouré de comtesses. [...] Mon imagination était sollicitée par
[ces oeuvres]. Balzac m'a apporté l'attachement à la vie. » En revanche, la
lecture de Pascal ne l'inspira guère, il en sortait même tout à fait déprimé,
selon ses dires: « Il s'agissait des réactions d'un homme qui avait un pied
dans la tombe et n'était plus intéressé que par ça. Moi, je voulais garder mes
deux pieds sur terre. »
Fasciné à cette époque par la religion hindoue,
Georges avait emporté plusieurs ouvrages sur le sujet: il eut tout le loisir
de méditer la thèse de l'identité du soi individuel, principal fondement de
l'hindouisme, qui l'a sûrement guidé dans sa quête d'absolu.
Malgré la fatigue, il enchaînait des nuits sans sommeil. Tenir coûte que coûte
: tel était son credo, au besoin en ingurgitant un peu d'armagnac pour éviter
un coup de pompe qui pouvait s'avérer fatal sous le feu du soleil.
Et puis un
matin, après avoir envoyé son message quotidien à Papeete, plus faible que
d'habitude, Georges fuma une pipe, prit sa carabine, siffla sa chienne et
commença la pénible ascension de la pente à la recherche d'un mouton qui lui
servirait de repas. Tout à coup, une grosse pierre, de celles que l'on choisit
habituellement pour poser son pied avec assurance, se déroba sous lui. Il
tomba et se fractura une cheville. Il se releva péniblement dans d'atroces
souffrances et essaya de marcher en s'appuyant sur sa carabine comme sur une
béquille. Dès le premier pas, il s'effondra, vaincu par la douleur, sur la
rocaille qui commençait à s'échauffer. Sans aliments et surtout sans boisson,
dévoré par les moustiques, il resta là en plein soleil toute la journée; il y
passa la nuit dans une agonie terrifiante. Ce n'est que le lendemain matin
que, faute d'émission, le technicien de Radio Tahiti comprit qu'il avait dû se
passer quelque chose d'anormal à Eiao l'administrateur fut alerté. Une
chaloupe se mit en route et débarqua sur l'île à la nuit tombante. Aux coups
de sirène ne répondaient que les aboiements d'Eder, au « chevet » de son
maître torturé par la chaleur, la soif et la douleur, qui guidèrent les
sauveteurs.
paysage aride de Eiao
Après cent dix-huit jours, presque quatre mois de lutte éprouvante et
désespérée contre une nature hostile, Georges abandonna, à bout de forces, et
accepta la venue d'un médecin des Marquises. « J'étais d'accord à condition
que cette décision vînt de Paris. Ce fut là ma seule faiblesse, ma seule
concession'. » Paul Gilson lui-même exigea le rapatriement du Robinson
français.
Soulagé mais triste de partir, notre héros fatigué était prêt à recommencer
l'aventure et à réinvestir l'île diabolique. Il avait pourtant perdu vingt
kilos et son état de santé général était alarmant. En France, ses proches
s'inquiétaient. « Notre mère était pendue au téléphone », se rappelle Louis de
Caunes, qui considère que son frère a été, dans cette
entreprise, plus aventureux qu'aventurier.
Au tout début de son isolement, Georges avait envoyé une lettre en forme de
testament (au profit de son fils Antoine) à son ami corse, le Dr Louis
Vincenti. « Il est très important qu'il sache que tu es mon meilleur ami »,
lui avait-il écrit, comme s'il envisageait la pire des hypothèses. En somme,
voulait-il mourir aux Marquises? Comme Gauguin, puis Jacques Brel ? Lors de
nos entretiens, Georges est toujours resté évasif sur ces questions, ignorant
lui-même à l'époque ce que le sort lui réservait, se rêvant encore et encore
en Robinson abandonné sur son île pendant plusieurs années.
Une évidence m'est apparue chez lui, cette obsession de la mise en danger,
presque suicidaire, qu'il a sans aucun doute héritée de la guerre. Dans le
roman de Defoe, Robinson expie ce qui est présenté comme le « pêché originel
», c'est-à-dire le fait d'avoir désobéi à son père pour courir l'aventure.
Peut-être Georges a-t-il considéré sa solitude à Eiao comme une juste punition
pour n'avoir pas emprunté les voies toutes tracées d'un destin prévisible. «
Ma mère disait que j'étais un fou, un original. Cette originalité, je
l'accepte. »
Arrivé à Papeete, le naufragé rescapé fut accueilli par l'actrice Martine
Carol, qui lui offrit le traditionnel collier de fleurs de bienvenue. Un peu
de réconfort ne pouvait pas faire de mal à cet homme revenu de l'état sauvage.
Pour JeanClaude Billet (ex-« boîte à idées » de Guy Lux, producteur et
réalisateur de télévision), « cette expérience fut un grand succès médiatique
». En effet, l'émission « Le Robinson
français » passionna des millions d'auditeurs. Georges reçut des centaines de
lettres de félicitations ou de remerciements, venant notamment de personnes
malades. Ses confrères journalistes se montrèrent moins enthousiastes, excepté
Pierre Lazareff, qui publia rapidement ses treize articles dans France-Soir.
La première salve vint de Jacques Perrier, du journal L'Aurore, qui fit le
voyage à Papeete pour obtenir une interview du Robinson épuisé. À la une, sous
le titre « Ce barbu fleuri », il parla d'« expérience manquée » et de « barbe
de loup de mer », le tournant en ridicule. « Il a fait une page entière
dégueulasse », me disait Georges, laissant éclater, quarante ans après, son
amertume d'avoir été moqué, voire dédaigné, par certains de ses confrères. Le
Canard enchaîné s'amusa en racontant que des vahinés venaient voir le
journaliste français sur son île comme dans le film Tahiti ou la joie de
vivre.
(vincent Rousset Georges de Caunes l'aventurier Ramsay edit.)
Hatutu île voisine et inhabitée elle aussi
Motu One
... et puis le rideau de l'obscurité a tout dérobé à notre vue ..; après un coucher de soleil superbe...comme la fin d'une pièce ou d'un beau film... beau à en pleurer de vérité . Sûr que dans 6 mois on est de nouveau aux Marquises ! foi d'ermite !!
Actuellement on est plein sud vers les atolls des Tuamotu : 2 ou 3 jours de
navigation en principe... même si la menace de quelques dépressions nous
tracasse... et nous obligera peut-être à nous mettre à l'abri avant ...je vous
tiens au courant !...
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